Les Israéliens après le retrait de Gaza

Depuis l’indépendance de l’État d’Israël en l948, et même depuis les premières réalisations du projet sioniste au début du XXème siècle, la société israélienne s’efforce de concilier trois objectifs. D’abord, ramener les juifs dans l’histoire des peuples et construire une souveraineté nationale autour d’une identité juive ; ensuite construire un État véritablement démocratique empreint des valeurs politiques européennes ; enfin, assurer les conditions de sa sécurité dans un environnement hostile qui a connu toutes les formes de confrontation armée, de la guerre conventionnelle au terrorisme aveugle. La diversité des forces politiques israéliennes se répartit d’ailleurs à l’intérieur du triangle que forment ces trois objectifs. Pendant longtemps, ils ont pu paraître inconciliables entre eux. Ainsi, un État authentiquement démocratique dans des frontières offrant une profondeur stratégique de nature à assurer sa sécurité conduisait à englober une large population arabe et donc à créer un État binational éloigné du projet sioniste initial. Tout au contraire, un État authentiquement juif à l’intérieur de frontières parfaitement sûres semblait devoir renoncer à son caractère démocratique tant il reposerait sur la domination des populations arabes. Enfin, un État véritablement démocratique construit autour de la seule société israélienne semblait devoir s’accommoder de frontières étroites et peu sûres.

Depuis 1967, les Israéliens ne semblaient pas vouloir choisir clairement entre ces trois compromis. L’absence d’interlocuteur arabe admettant la réalité nationale et étatique juive, tout comme l’omniprésence des menaces, avaient longtemps permis de repousser ce choix fondamental.

Le retrait de Gaza au cours de l’été 2005 marque un point d’inflexion majeur dans la manière dont la société israélienne semble vouloir traiter ce dilemme.

L'auteur

Sylvain Cypel