En 2014, l’Australie préside le G20. Les dirigeants des pays qui représentent 90% du PIB de la planète se retrouveront en novembre à Brisbane.
Dans ce contexte, En Temps Réel a souhaité mieux faire connaitre en France quelques réformes conduites au cours des dernières années en Australie, le pays-continent de 23 millions d’habitants, qui entre dans sa vingt troisième année de croissance ininterrompue et qui atteint les meilleurs niveaux de bien-être et de progrès social dans les classements de l’ONU et de l’OCDE.
Jean-Pascal Beaufret montre dans ce cahier comment l’Australie a mieux réussi que d’autres pays développés à traverser la plus grande crise économique et financière depuis 1929. D’abord en raison de liens commerciaux intenses avec la Chine qui lui achète, en grandes quantités, minerai de fer et charbon, mais aussi grâce à un plan de relance d’une ampleur exceptionnelle, rapidement décidé en 2008, qui a permis d’éviter la récession et de maintenir le plein emploi. Ce « stimulus », difficile à mettre en oeuvre dans un pays fédéral où, de surcroît, la dépense publique est suspecte d’inefficacité, a été possible grâce aux excédents budgétaires accumulés par les gouvernements de gauche et de droite depuis 1994.
Surtout, Jean-Pascal Beaufret montre combien la capacité d’adaptation de l’Australie aux chocs externes trouve sa source dans la flexibilité de son économie et dans les réformes introduites par les gouvernements travaillistes, avec Paul Keating pendant les années 1990. La constitution de retraites individuelles obligatoires par capitalisation qui associent des syndicats forts, la flexibilité accrue du marché du travail, l’ouverture a une forte immigration, le maintien d’un niveau de prélèvement fiscal modéré et le retour aux excédents budgétaires, sont autant d’éléments qui ont préparé l’Australie à traverser la crise mondiale des cinq dernières années.
Les débats politiques se sont organisés autour des enjeux de long terme: environnement et transition énergétique, la contribution du secteur minier au reste de l’économie, ou encore les infrastructures de transport et de communications avec le réseau de très haut débit pour tous, ont été au cours des six dernières années les principaux points de débat entre la gauche au pouvoir, qui a lancé des initiatives audacieuses, et la droite qui a vigoureusement contesté le rôle nouveau que l’Etat entendait jouer dans la croissance économique.
Jean-Pascal Beaufret, qui a participé activement pendant trois ans à la mise en place de la fibre optique pour tous en Australie, nous propose dans ce cahier une analyse de chacun de ces débats. Il examine comment le parti travailliste, qui a préservé la prospérité et porté des réformes importantes depuis 2007, a néanmoins perdu les élections de septembre 2013.
Une partie de la réponse est certes spécifique à la vie politique australienne, notamment au régime parlementaire caractérisé par un cycle électoral très court de trois ans, et aux attentes d’une opinion publique particulièrement exigeante. Mais au-delà de ces particularités Les expériences politiques australiennes des dernières années nous rappellent la nécessité pour tout gouvernement d’un grand pays démocratique de
sélectionner, et de préparer à l’avance avec soin, un petit nombre d’actions et de les mettre en oeuvre rapidement avec un narratif politique cohérent.
Au total toutefois, les gouvernements travaillistes australiens ont engagé le pays dans la transition du secteur énergétique et dans une amélioration substantielle des services d’éducation. Ils ont opéré un rattrapage important sur les infrastructures de transport et de gestion de l’eau comme sur le développement nouveau d’une nouvelle infrastructure digitale. Ils ont instauré une couverture des dépenses des handicapés qui n’existait pas. Tout ceci a été accompli avec des processus de débat, délibération et décision particulièrement ouverts.
Aussi, même si la droite au pouvoir revient sur certaines de ces réformes, le bilan des travaillistes australiens peut inspirer de nombreux pays avancés pour traverser une crise économique internationale tout en engageant des réformes de structures indispensables.